Des études ont montré que loger [des SDF] coûte moins cher que les laisser à la rue

20 Nov 2020

 

JULIEN BAYOU 

« Des études ont montré que loger [des SDF] coûte moins cher que les laisser à la rue »
Le 15 novembre 2020, le secrétaire national d’Europe Écologie-Les Verts, Julien Bayou a indiqué que loger les sans domicile fixe coûtait moins cher que de les laisser à la rue. Il s’appuie sur le dispositif Housing first, traduit en France par « Logement d’abord » ou par « Un chez soi d’abord », qui en a effectivement fait la démonstration.

LE CONTEXTE

Le 15 novembre 2020, Julien Bayou, secrétaire national d’Europe Écologie-Les Verts (EELV), était l’invité de « Dimanche en politique  », le magazine politique de France 3. En 2006, Julien Bayou a fondé le collectif Jeudi noir, qui consistait à occuper des locaux vides, non loués, pendant que des personnes vivaient dans la rue. Alors que la fondation Abbé Pierre a recensé 300 000 sans domicile fixe en France, en 2020, le journaliste Francis Letellier a interrogé le politique sur les mesures à prendre à la fin de la trêve hivernale. Julien Bayou a affirmé : « Des études ont montré que loger les gens, le logement d’abord, donner les clefs d’un accompagnement au logement, c’est l’aspect économiciste, coûte moins cher que les laisser à la rue ».

L’EXPLICATION

Pour avancer que loger les SDF coûte moins cher que de les laisser dehors, Julien Bayou se réfère au dispositif Housing first. Ce concept, né dans les années 1990 au Canada et aux États-Unis, voit le logement non pas comme une finalité, mais comme un point de départ pour permettre aux sans-abri de se réinsérer. 

En 1992, Sam Tsemberis fonde Pathways to Housing, premier programme de Housing first. Pendant deux ans, il mène une étude sur 255 sans domicile fixe qui souffrent de troubles psychiques ou d’addictions. Au bout de 24 mois, les SDF ayant bénéficié du Housing first étaient logés de façon stable à 80 % contre 37 % pour les autres qui ont suivi le modèle classique de l’accession au logement par palier, c’est-à-dire quand le sans-abri doit passer par un hébergement d’urgence, par un centre d’hébergement et de réinsertion sociale, puis par un logement accompagné avant d’être autonome. 

Sur le plan économique, l’étude Public service reductions associated with placement of homeless persons with severe mental illness in supportive housing de l’université de Pennsylvanie montre que les 10 % des « sans-abri chroniques » consomment 50 % des ressources pour lutter contre le sans-abrisme. Les loger permet donc de faire des économies sur d’autres programmes.  

En France, en 2016, l’Assistance publique Hôpitaux de Marseille annonce que loger des sans-abri permet de faire des économies. Elle s’appuie sur les résultats du programme expérimental « Un chez-soi d’abord » lancé entre 2011 et 2015 à Paris, Marseille, Lille et Toulouse. Les 720 personnes sans domicile fixe volontaires pour l’étude ont été divisées en deux groupes : l’un restait dans la rue, l’autre était logé. Après un an d’accompagnement, 80 % des personnes sont encore dans leur logement. Leur durée moyenne d’hospitalisation est diminuée de moitié comparé aux personnes restées dans la rue. Les volontaires qui sont logés ne fréquentent plus les hébergements d’urgence, précaires ou les foyers. Les résultats de cette expérimentation montrent que 85 % des personnes logées gardent leur logement personnel quatre ans plus tard. 

En 2017, la Dihal (délégation interministérielle à l’hébergement et à l’accès au logement) souligne que ce dispositif permet de rationaliser la dépense publique. En effet, le coût annuel moyen des dépenses induites par l’utilisation des structures sanitaires, d’hébergement et de justice s’élevait à 30 000 € par an et par SDF à leur entrée dans le dispositif. Ce coût est évalué à 14 000 € par an et par personne avec « Un chez-soi d’abord ». 70 % des économies réalisées concernent les hospitalisations, les 30 % restants se rapportent aux structures d’hébergement.

Ainsi, il a été prouvé à plusieurs reprises, à travers plusieurs dispositifs, que loger les sans domicile fixe coûtait moins cher que de les laisser dans la rue. Les propos de Julien Bayou sont donc vrais.   

Caroline Frühauf

Les sources à consulter

  • Gouvernement.fr : « Bilan de 6 années d’expérimentation d’Un chez-soi d’abord par la Dihal »
  • Écologie.gouv.fr : « Le dispositif « Un chez soi d’abord” expliqué »