Contexte
L’accélération de la propagation du Mpox sur le continent africain a conduit l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à déclarer, le 14 août, la Mpox une urgence de santé publique de portée internationale.
C’est dans ce contexte qu’une vidéo d’une minute et neuf secondes a été mise en ligne le 28 août 2024 sur le réseau social TikTok. Elle montre une femme s’exprimant en lingala, l’une des langues nationales de la RDC, expliquer comment elle a été guérie grâce à l’application de feuilles de manioc pilées mélangées avec du sel et du jus de canne à sucre : « J’ai souffert de cette maladie qui fait apparaître des boutons sur le corps, j’ai été guéri grâce aux feuilles de manioc pilées mélangées avec du sel et appliquées sur tout le corps. Vous pouvez également appliquer le jus de canne à sucre ».
La vidéo a suscité un vif intérêt, atteignant des centaines de milliers d’internautes et recueillant jusqu’à 28 000 « j’aime ».
Sur Whatsapp, une note vocale recommandant l’utilisation du carburant mélangé avec de l’huile de palme comme remède contre le Mpox a également circulé, notamment dans le groupe Tusimame Imara Kwa Kupigania Inchi Yetu – qui veut dire « Levons-nous pour défendre la patrie » qui compte 1 025 membres.
Dans la note ci-dessous par exemple, l’internaute explique que le mélange de diesel et d’huile de palme, appliqué sur la peau, pourrait faire disparaître les symptômes en quelques jours.
« Partager ce message. Cette nouvelle maladie qui se caractérise par des coups de vent comme la rougeole, la maladie de Monkey, c’est une maladie qui se traite très facilement. Son remède est de prendre le diesel d’un véhicule que vous récupérez à la station. Une mesurette de tomate que vous mélangez avec 2 ou 3 mesurettes d’huile de palme. Il faut chaque fois mettre ça sur votre corps. Si vous mettez ce produit sur la personne qui a cette tempête, 2 à 3 jours, cette maladie va sécher. Ce n’est pas un médicament mystérieux qui demande à quelqu’un d’aller à l’hôpital, il ne faut pas paniquer… » , explique l’internaute dans une note vocale enregistrée en swahili et largement partagée dans des forums WhatsApp en RDC.
Dans une vidéo publiée sur le compte officiel X du Ministère de la santé publique, de l’hygiène et de la prévoyance sociale, le Docteur Samuel Roger Kamba , responsable de ce ministère, n’a pas évoqué le remède déjà découvert en RDC. En revanche, il a fait le point sur la situation générale de l’épidémie de Mpox au cours de la 33 ème semaine, allant du 12 au 18 août 2024. « Selon le rapport de la semaine épidémiologique du 12 au 18 août 2024, 1372 nouveaux cas suspects, 200 nouveaux cas confirmés, et 35 décès ont été signalés dans des provinces les plus touchées à la semaine 33. Le cumul des cas depuis le début de l’année 2024 est de 17801 avec 601 décès », a déclaré le ministre de la santé en RDC.
Les faits
Nous avons émis des doutes quant à l’authenticité de ces allégations et sur la prétendue efficacité de ces remèdes, d’autant plus que le ministère de la Santé de la RDC n’a rapporté aucune découverte d’un traitement efficace contre la variole de singe autrement appelée Monkey pox. De plus, l’Institut national de recherche biomédicale (INRB ) n’a fait aucune annonce sur d’éventuels médicaments dérivés de plantes médicinales ou d’autres combinaisons comme remèdes contre le Mpox en RDC.
En menant nos recherches, nous n’avons trouvé aucun remède découvert en Afrique pour lutter contre l’épidémie de Monkey pox sur le continent. Actuellement, la vaccination constitue l’une des principales stratégies de lutte, selon le ministère congolais de la Santé.
En Afrique, un lot de 10 000 doses a été reçu au Nigéria le 28 août dernier. « Les vaccins, Jynneos (MVA), fabriqués par la firme pharmaceutique Bavarian Nordic, ont été donnés par le gouvernement des États-Unis. Les vaccins seront déployés dans cinq États où le nombre de cas de Mpox est le plus élevé. Ils seront administrés en deux doses à 5.000 personnes les plus exposées au risque de Mpox », a annoncé l’agence sanitaire mondiale de l’ONU.
Une nouvelle variante circule depuis septembre 2023 parmi les travailleuses du sexe dans le Sud-Kivu
En 2022, en Europe, le traitement utilisé était l’agent antiviral Tecovirimat initialement conçu pour traiter la variole, qui a été appliqué lors de l’épidémie de 2022-2023. Ce traitement est réservé aux formes sévères de la maladie et doit être administré le plus tôt possible, par voie orale, pendant une durée de 15 jours. Son efficacité clinique nécessite d’être réalisée de manière rigoureuse.
« Le Tecovirimat a obtenu une autorisation de mise sur le marché européen (AMM) sous circonstances exceptionnelles le 6 janvier 20223 dans le traitement des infections à virus Smallpox, Monkeypox et Cowpox chez les adultes et les enfants pesant au moins 13 kg. Il est également indiqué dans le traitement des complications dues à la réplication du virus de la vaccination après la vaccination antivariolique », indique Sante.fr.
Actuellement, l’épidémie de Mpox est « active » dans 13 pays d’Afrique. La RDC représente à elle seule plus de 90% des 3.500 cas confirmés la région , selon l’OMS, qui souligne que le niveau de prévalence varie d’un pays à l’autre sur le continent.
Par ailleurs, le clade I du Mpox signalé en RDC entraîne un nombre plus élevé d’infections et un taux de mortalité supérieur à celui du clade IIb Mpox . Alors que l’épidémie de 2022 hors d’Afrique a principalement touché la communauté gay et bisexuelle en raison de la transmission sexuelle, le virus qui sévit en RDC est particulièrement mortel et affecte surtout les enfants. De plus, une nouvelle variante circule depuis septembre 2023 parmi les travailleuses du sexe dans le Sud-Kivu.
Mode de prévention contre Mpox
Dans les zones endémiques en Afrique, la principale stratégie de prévention du Mpox consiste à limiter les interactions entre les humains et la faune sauvage. Cela implique de sensibiliser et d’informer les populations sur les facteurs de risque liés à la transmission zoonotique, afin de réduire les risques de transmission de l’animal à l’humain.
Les contacts physiques étroits, y compris les relations sexuelles, avec une personne infectée par le Mpox, ainsi que le contact avec ses effets personnels ou des objets qu’elle a utilisés, augmentent le risque d’infection. Pour réduire ce risque, il est conseillé de se faire vacciner contre le Mpox, si vous y êtes éligible, et de limiter le nombre de partenaires sexuels.
La République démocratique du Congo a reçu la première livraison de doses de vaccin contre l’épidémie de Mpox le jeudi 05 septembre 2024. Il s’agit d’un lot de 99 100 doses de vaccins. Ces doses de vaccin ont été officiellement réceptionnées par le ministre de la Santé publique de la RDC, le docteur Samuel Roger Kamba, en présence du docteur Jean Kaseya, directeur général d’Afrique CDC.
« La réception de ces vaccins est une étape essentielle dans notre combat contre la Mpox. Notre engagement est de garantir la santé de notre population, en particulier celle de nos enfants, qui sont les plus vulnérables. Nous travaillons en collaboration étroite avec nos partenaires pour limiter la propagation de cette maladie et garantir un avenir sain pour tous les Congolais », indique le Docteur Samuel Roger Kamba ministre de la Santé publique, hygiène et Prévention, RDC.
Le 10 septembre 2024, Balobaki a eu accès aux données du centre des opérations d’urgences de santé publique du ministère congolais de la santé, jusqu’au 2 septembre, selon ces données, le cumul des cas était de 19750 cas suspects, 4894 cas confirmés, 632 décès, et 3456 guéris.
Pour conclure, en RDC, aucun médicament efficace pour traiter la variole du singe, Monkey pox, n’a été découvert ni confirmé par le ministère de la Santé. L’utilisation de remèdes tels que : « Carburant mélangé avec l’huile de palme » ainsi que « l’application des feuilles de manioc pillées et du jus de canne à sucre sur le corps » n’est ni approuvé ni reconnu par le ministère de la Santé ou l’Institut national de recherche biomédicale INRB.
Glodi MIREMBE
Lire l’article original sur Balobaki Check : https://balobakicheck.com/carburant-huile-de-palme-feuilles-de-manioc-et-jus-de-canne-des-remedes-non-prouves-contre-le-mpox/