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[Résumé] Focus Pays : état des médias et du journalisme en Italie

Bruxelles 2024

22 Nov 2024

Comment sauver la presse et l'investigation avec des médias aux techniques vieillissantes et une extrême droite au gouvernement. Tel est le défi de la presse italienne.
De gauche à droite : Raffaele Lorusso, Giovanni Melogli, Laura Battaglia et Matteo Trevisan

Avec Matteo TREVISAN, chercheur associé à l’Institut universitaire européen de Florence (EUI), Laura BATTAGLIA, journaliste indépendante et Raffaele LORUSSO, journaliste à La Repubblica et syndicaliste, ancien secrétaire général de la Federazione nazionale stampa italiana.

Animé par Giovanni Melogli, du Centre pour le pluralisme et la liberté des médias, coordinateur du Voices Festival. 

 

Les enjeux

Attaques personnelles, procédures judiciaires, volonté des politiques de contrôler les médias publics… La situation des médias semble se dégrader en Italie où le gouvernement d’extrême-droite de Giorgia Meloni est très hostile à l’égard de la presse, notamment d’investigation. Le travail et la liberté de la presse sont remis en cause. Sur le plan économique, les médias italiens doivent attirer de nouveaux publics, jeunes ou internationaux. La presse transalpine est globalement en retard au niveau des réseaux sociaux et du numérique ainsi que sur l’usage de langues autres que l’italien.

 

 

Ce qu’ils ont dit

Laura Battaglia. « Pour moi, la première problématique est l’isolement. Nous souffront de l’isolation linguistique. »

« Nous avons des syndicats qui sont très forts. Nous ne pouvons plus avoir autant de gens dans le secteur qui jouissent d’autant de droits. »

« Les derniers nés des médias italiens sont en plein essor mais ils utilisent les moyens d’impression anciens. Ils ne se sont pas adaptés au contexte numérique international. »

« Le journalisme, ce n’est plus seulement rédiger quelques lignes sur ce qui s’est passé quelque part avec une source avec laquelle on ne parle pas. Les meilleurs se font respecter et gagnent la confiance des publics en utilisant les outils numériques. »

« Il faut être sur le terrain, les gens veulent savoir pourquoi, comment. C’est ça la clé. Si les actionnaires et les propriétaires comprennent cela, nous pourront regagner la confiance des gens. Nous pourrons survivre, j’en suis convaincue. »

Raffaele Lorusso. « C’est difficile d’aborder ces questions en Italie. Les attaques personnelles contre les journalistes sont un phénomène qui remonte à de nombreuses années. »

« Ils sont menacés par des groupes criminels, la mafia. Il y a un autre problème avec l’Etat. La situation a empiré. Le gouvernement s’est engagé dans une lutte contre les journalistes, les médias libres. »

« Le service public en Italie [la Rai] a toujours été contrôlé par le politique. En 2014, une loi a donné la possibilité de fixer la gouvernance du service public. Ça fait une différence. Aujourd’hui, la droite au pouvoir pense qu’elle doit tout prendre. »

« En lisant certaines conventions collectives, comme celle du Corriere della Sera, on a l’impression d’être dans une organisation du travail des années soixante. Il est parfois nécessaire de changer complètement l’organisation du travail. »

Matteo Trevisan . « Nous avons vu une augmentation des menaces juridiques qui sont portés par les acteurs politiques et gouvernementaux. Ça conduit à l’autocensure. »

« Pour l’autonomie éditoriale on voit qu’on a besoin de sauvegardes collectives pour empêcher que les pouvoirs politiques prennent le contrôle. »

« Il y a un grave déséquilibre en défaveur des femmes dans la gouvernance des postes éditoriaux. »

 

À retenir

Les journalistes et médias italiens doivent faire face à de nombreuses menaces. Les violences physiques contre les journalistes, notamment exercées par la mafia, les mettent en danger et menace leur travail. Les attaques, verbales voire judiciaires, menées par des responsables politiques et gouvernementaux sont des moyens de pression. Les médias de la péninsule ont également du mal à rayonner à l’international. L’italien est parlé essentiellement en Italie. La presse nationale diffuse peu en d’autres langues plus parlées comme l’anglais ou l’arabe. Le retard numérique des médias transalpins freine également la recherche de nouveaux publics.

Axel Dumond (EJC)