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Vrai, Rima Hassan a bien le statut de «réfugiée palestinienne»

France
Politique

20 Jan 2025

Depuis les attaques du 7 octobre 2023, les prises de parole de la juriste et députée européenne suscitent des interrogations sur le statut qu'elle affirme détenir. Journalistes et détracteurs ont contesté son statut de réfugiée palestinienne. Il est primordial de clarifier les faits. Bien qu’elle soit née en Syrie, Rima Hassan est officiellement reconnue comme réfugiée palestinienne par l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Cette reconnaissance s'inscrit dans un cadre historique et juridique.
Contexte

Simon Moos, auteur et rédacteur en chef du média en ligne IN+, connu pour son approche axée sur la défense des valeurs occidentales, a publié une vidéo le 9 mai 2024 sur son compte Twitter (X) où il interroge l’usage et la véritable signification du statut revendiqué par Rima Hassan. Celui du « statut palestinien. » La vidéo a été visionnée plus de quatre millions de fois et partagé près de six mille fois. Il y indique : « Le statut de réfugié à un sens : celui de venir au secours des personnes en détresse. En le manipulant à des fins politiques, en faisant de lui, l’instrument d’une campagne idéologique aux relents anti-juifs et génocidaires, Rima Hassan, l’UNRWA et l’écosystème anti-israélien, dévoient ce statut de sa fonction sacrée. »

En 2023, Rima Hassan rejoint La France insoumise en vue des élections européennes de 2024 ; elle est élue députée européenne le 9 juin 2024. Capture d’écran de la vidéo publiée sur le compte X de Simon Moos.

 

Cette vidéo apparaît quelques jours après la publication d’un article par le média Atlantico. Co-écrit par Karim Maloum, Simone Rodan-Benzaquen, Guillaume Lagane et Yana Grinshpun, spécialistes en géopolitique, sociologie et politique européenne, cet article examine le parcours de Rima Hassan, ses prises de position, et interroge son authenticité ainsi que son rôle au sein de La France Insoumise, notamment au regard de ses alliances idéologiques. Publié le 1er mai 2024, il précise : « Son statut de réfugiée palestinienne alors qu’elle n’a jamais mis les pieds dans les territoires palestiniens, devrait nous interroger. Elle est née en Syrie et a la citoyenneté française…. Il s’agit donc d’une identité inventée. » Par ces mots, les journalistes et essayistes remettent en question l’histoire du passé de Rima Hassan. 

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En septembre 2023, déjà, sur la plateforme X, la député Rima Hassan s’adresse directement à ceux qui interrogent son histoire. Notamment dans plusieurs tweets du 17 septembre où elle écrit notamment: « Personne n’a à donner de leçons aux palestiniens sur la revendication légitime qu’ils font de leurs droits. C’est précisément parce que je suis sortie d’un camp de réfugiés que je peux et dois dire ce que c’est d’être réfugié palestinien et de rappeler notre droit au retour. »

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À la suite de ses nombreuses prises de paroles sur la plateforme et de sa médiatisation grandissante après les attaques du 7 octobre, plusieurs essayistes et journalistes ont indiqué qu’elle mentait quant à ses origines de sorte que le statut de réfugié palestinien a une signification particulière. 

Vérification

Le statut de réfugié palestinien n’est pas uniquement lié à un lieu de naissance. Il repose sur la désaffiliation forcée de la Palestine mandataire lors des conflits de 1948 ( la Nakba ) et, dans certains cas, de 1967. Les ascendants de Rima Hassan ont été déplacés lors de ces événements, qui ont vu des centaines de milliers de Palestiniens perdre leurs foyers et leurs terres. C’est ce que nous pouvons lire dans un papier du Middle East Eye qui a recherché les origines familiales de Rima Hassan, précisant que sa famille paternelle est originaire du village d’al-Birwa, déplacée lors de la Nakba en 1948 : « Her paternal side of the family originated from the village of al-Birwa located 10.5km east of Acre, in present-day northern Israel. » (Traduction : Sa famille paternelle est originaire du village d’al-Birwa situé à 10,5 km à l’est d’Acre, dans le nord de l’État d’Israël actuel.) L’UNRWA, l’agence onusienne spécialement créée pour venir en aide aux réfugiés palestiniens, reconnaît leurs descendants directs comme étant également réfugiés. Ce statut garantit une continuité des droits des réfugiés et la reconnaissance des injustices historiques subies par les familles palestiniennes.

Les grands-parents de Rima Hassan, comme des centaines de milliers d’autres Palestiniens, ont trouvé refuge en Syrie après avoir été expulsés ou avoir fui leur patrie historique. Comme le rapporte Middle East Eye, « Hassan was born stateless in April 1992 in Syria to a family who fled during the Nakba (catastrophe in Arabic), when around 750,000 Palestinians were ethnically cleansed from their home by the Zionist forces to make way for the creation of Israel in 1948 ». (Traduction : Hassan est née apatride en avril 1992 en Syrie, d’une famille qui a fui pendant la Nakba (la ‘catastrophe’ en arabe), lorsque près de 750 000 Palestiniens ont été nettoyés ethniquement de chez eux par les forces sionistes pour permettre la création de l’État d’Israël en 1948. ) La Syrie, tout comme le Liban, la Jordanie ou d’autres pays de la région, a accueilli ces réfugiés dans des camps administrés par l’UNRWA, notamment le camp de Neirab, près d’Alep, où Rima Hassan est née. Cependant, cette installation ne signifie pas une intégration pleine et entière. Contrairement à d’autres réfugiés, les Palestiniens n’ont pas été naturalisés dans leurs pays d’accueil, souvent pour préserver leur droit au retour à leur patrie d’origine. Ainsi, bien que née en Syrie, Rima Hassan n’a pas la citoyenneté syrienne et reste enregistrée comme réfugiée palestinienne.

La définition de « réfugié palestinien » par l’UNRWA est claire : « Toute personne – et ses descendants directs – qui vivait en Palestine lorsqu’elle était sous mandat entre juin 1946 et mai 1948 et qui a perdu son foyer et ses moyens de subsistance à la suite du conflit israélo-arabe de 1948, est considérée comme réfugié palestinien. » En outre, ce statut est reconnu internationalement pour permettre la revendication du droit au retour des réfugiés palestiniens à leurs foyers d’origine, tel que stipulé dans la résolution 194 des Nations Unies. Les conditions de vie en exil, même prolongé, ne modifient pas ce droit, ni le statut de réfugié.

Certains articles ont argumenté que la naissance en Syrie exclut automatiquement Rima Hassan du statut de réfugiée palestinienne. Cette interprétation est erronée et reflète une incompréhension des particularités du dossier palestinien. Contrairement à d’autres groupes de réfugiés, les Palestiniens bénéficient d’un traitement spécial en raison de l’absence d’une solution durable à leur situation.

Conclusion

Le statut de réfugiée de Rima Hassan n’est ni une exception, ni une anomalie. Il est le résultat d’un cadre juridique et historique bien défini.

 

Camille AMARA (Factoscope)