Non, la MONUSCO n’opère pas sans agenda en RDC

République démocratique du Congo
Institutions | Sécurité et défense

4 Sep 2023

6 minutes de lecture
Un compte X (ex-Twitter) a affirmé le 31 aout dernier que la mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) est présente dans le territoire congolais depuis 1998 sans agenda. Cette publication, qui intervient alors que près de 50 civils ont été tués par l’armée congolaise au lendemain d’une manifestation contre cette organisation, est fausse.

Une publication mise en ligne le 31 août dernier et affirmant : « La MONUSCO est présente en RDC depuis 1998 sans agendas qui servent le pays. Aujourd’hui les civils sont sortis pour manifester pacifiquement et on les tue comme des gibiers. Quand est-ce que nous serons considérés comme des humains par nos dirigeants et leurs complices? » est devenue virale. Elle a été visionnée par plus de 32 000 personnes, retweetée par 330 autres personnes et affiche 584 mentions j’aime et 75  commentaires. Elle prétend que la MONUSCO opère en RDC sans agenda et ne favorise pas un climat de paix. Elle intervient alors que près de 50 civils ont été tués par l’armée congolaise au lendemain d’une manifestation contre cette organisation.

Les faits

La Mission de l’Organisation des Nations unies en République démocratique du Congo (MONUC) a été créée en juillet  1999 sur demande de l’ancien président Laurent Désiré Kabila, après la signature de l’Accord de Lusaka entre la République démocratique du Congo (RDC) et cinq États de la région (Angola, Namibie, Rwanda, Ouganda et Zimbabwe), peut on lire sur le site dans de l’organisation dans la rubrique à propos.

Après le génocide rwandais de 1994, certains des auteurs des violences se sont réfugiés dans la région voisine du Kivu, dans l’est de la RDC. En 1998, certains d’entre eux ont lancé une rébellion contre le président de la RDC de l’époque, Laurent Kabila.

L’Angola, le Tchad, la Namibie et le Zimbabwe ont promis à Kabila un soutien militaire, mais les rebelles ont maintenu leur emprise sur les régions orientales.

Le Rwanda et l’Ouganda auraient soutenu le mouvement rebelle, le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD). Pour éviter un dangereux conflit régional, le Conseil de sécurité des Nations unies a appelé à un cessez-le-feu et au retrait des forces étrangères. Il a également exhorté les États à ne pas s’ingérer dans les affaires intérieures de la RDC.

Le cessez-le-feu qui en a résulté a conduit à la création de la MONUSCO.

A compter du 1er juillet 2010, elle a été rebaptisée Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO). Elle  était la résultante de la résolution 1279 du 30 Novembre 1999 du Conseil de sécurité des Nations Unies, prévue pour mettre en place une mission d’observation de la trêve et le désengagement des forces et de maintenir la liaison avec toutes les parties à cet accord de cessez-le-feu.

Plus tard, dans une série de résolutions, le Conseil a élargi le mandat de la MONUC à la surveillance de la mise en œuvre de l’Accord de cessez-le-feu et à des multiples tâches additionnelles.

La MONUC avait comme mission de contribuer à la restauration de la paix et de la sécurité nationale pour mettre fin aux conflits armés qui ont parsemé l’histoire politique de la République démocratique du Congo depuis le 2 août 1998.

Ses missions initiales étaient :

1. « Etablir des contacts avec les signataires de l’accord de cessez-le-feu au niveau des quartiers généraux et dans les capitales des Etats signataires de l’Accord de Lusaka ;

2. Etablir une liaison avec la commission militaire mixte et lui fournir une assistance technique dans l’exercice de ses fonctions découlant de l’Accord de cessez-le-feu, y compris les enquêtes sur les violations du cessez-le-feu ;

3. Fournir des informations sur les conditions de sécurité dans tous ses secteurs d’opérations, notamment sur les conditions locales affectant les décisions futures concernant l’introduction du personnel des Nations-Unies ;

4. Elaborer des plans en vue de l’observation du cessez-le-feu et du dégagement des forces ;

5. Maintenir la liaison avec toutes les parties à l’Accord de cessez-le-feu afin de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire aux personnes déplacées, aux enfants et autres personnes touchées et d’aider à la défense des droits de l’homme, y compris les droits de l’enfant.

Dans sa nouvelle mission à dater de 2010, la MONUSCO a été autorisée à utiliser tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de son mandat, notamment en vue d’assurer la protection des civils, du personnel humanitaire et du personnel chargé de défendre les droits de l’homme se trouvant sous la menace imminente de violences physiques et pour appuyer le Gouvernement de la RDC dans ses efforts de stabilisation et de consolidation de la paix.

Quid de l’avenir de la MONUSCO en RDC ?

Depuis quelques années, les autorités congolaises réclament le retrait effectif des troupes de la mission onusienne, appuyées par une partie de la population et certains membres de la société civile.

L’ONU a d’ailleurs proposé une réduction d’effectifs pour 2015 avec le retrait de 2 000 hommes, soit environ 10% des troupes.

En juin dernier, la  cheffe de la MONUSCO, Bintou Keita, évoquait le plan de retrait des Casques bleus. Dans son discours, elle indiquait que le retrait de la mission de maintien de la paix interviendrait après la “réalisation des conditions minimales du plan de transition”.

Contexte

Au moins quarante-huit civils et un policier ont été tués mercredi 30 août à Goma, en République démocratique du Congo dans une opération militaire destinée à empêcher une manifestation contre l’ONU, selon des sources locales et d’après un rapport de l’armée. Dans un document interne des Forces armées congolaises (FARDC) et authentifié par des sources militaires et du renseignement, le bilan de l’opération de mercredi s’élève, comme l’indique l’agence Reuters, à 43  morts dont un policier et 56 blessés.

De son côté, la MONUSCO a  encouragé les autorités congolaises à diligenter une enquête prompte et indépendante et les invite à traiter les personnes détenues dans le respect de leurs droits en vertu de la Constitution et des engagements internationaux du pays. Deux officiers de l’armée congolaise ont été interpellés dimanche 3 septembre après la mort des civils à Goma, selon un communiqué du ministère de l’Intérieur.

Pour conclure, l’affirmation selon laquelle la mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) est présente dans le territoire congolais depuis 1998 sans agenda est fausse.

Asaph MAWONDA