Médiateur, garder le lien avec le public

Tours 2018

13 Mar 2018

5 minutes de lecture

« Une fois par mois je reprends les commentaires et les reproches des auditeurs »

 

Les médiateurs de presse sont peu connus. Ils ne sont que neuf à exercer ce poste en France. Quatre d’entre eux témoignent de leur expérience et détaillent leur travail au quotidien. 

 

 

« J’ai toujours essayé d’être à l’écoute »

Marie-Laure Augry a occupé le poste de médiatrice des rédactions de France 3 de 2003 à 2017.

Marie-Laure Augry

Marie-Laure Augry. Photo : Lucie Martin

Quels sont le rôle et la fonction d’un médiateur de presse ?

Marie-Laure Augry. Le médiateur, c’est le lien entre les téléspectateurs et les rédactions. Personnellement, j’étais dédiée à la médiation du pôle information de France Télévisions. Un médiateur, c’est comme une balise. Il faut être à l’écoute et les téléspectateurs savent qu’ils peuvent s’adresser à nous dans une démarche complémentaire, différente de ce qu’ils peuvent faire sur les réseaux sociaux. Ils s’adressent à une personne identifiée. Il y a un dialogue, un échange. On m’a proposé de présenter, une fois par mois, une émission sur France 3 dédiée à la médiation. C’est après cette confirmation que j’ai accepté le poste. Cette émission est un lieu d’échange autour des questions qui interpellent les téléspectateurs.

Justement, cette arrivée des réseaux sociaux n’a-t-elle pas perturbé votre métier ?

M-L. A. L’un ne peut pas se substituer à l’autre. C’est un complément. S’adresser directement aux journalistes, oui, mais ont-ils seulement le temps de lire et de répondre à ce qu’on leur envoie ? Je n’en suis pas sûre. La fonction du médiateur, c’est d’être là pour apporter des réponses, justement. 

Il y a beaucoup de demandes ?

M-L. A. Aujourd’hui, tout le monde est acteur de l’information. Chacun s’informe comme il le veut, plusieurs fois par jour, sur plusieurs médias. Tout le monde s’informe, transmet, commente… Alors qu’on parle beaucoup de la crédibilité et de l’utilité des journalistes, je pense qu’ils ont besoin de savoir comment les journalistes travaillent. Pourquoi avoir fait ce choix ? Pourquoi cette hiérarchie ? Le public s’interroge de plus en plus.

Comment a évolué le poste de médiateur ?

M-L. A. Il y a très peu de temps, il n’y en avait qu’un ou deux. Le premier médiateur était celui du journal Le Monde. Il a fallu attendre pour que d’autres apparaissent. La particularité en France, c’est qu’il y a des médiateurs dans les télévisions de service public mais très peu ailleurs. Aujourd’hui, c’est une obligation pour les chaînes d’avoir un médiateur. On part du principe qu’une télévision du service public appartient à tout le monde et que le téléspectateur en est partenaire. Il doit donc avoir un interlocuteur privilégié.

Le public est-il suffisamment au courant de l’existence des médiateurs ?

M-L. A. La fonction de médiateur est, je pense, beaucoup plus connue aujourd’hui qu’elle ne l’était il y a 20 ans. L’audiovisuel public a probablement donné cette notoriété à la fonction de médiateur grâce à cette présence à l’antenne, avec les émissions dédiées. C’est le cas sur Franceinfo et sur France Inter, ainsi que sur France 3. Les médiateurs sont également visibles dans la presse écrite, lorsqu’ils publient un billet ou une chronique par exemple.

Quelle relation y a-t-il entre les médiateurs et la rédaction ?

M-L. A. Il y a une grande évolution des journalistes dans les rédactions. S’ils pouvaient être réticents ou méfiants auparavant, ils prennent aujourd’hui conscience de l’importance de ce dialogue. Je ne me suis jamais sentie rejetée. Ça ne fait pas toujours plaisir de recevoir des critiques mais, globalement, ce n’est pas difficile d’être médiateur. Cela dépend également de la méthode que l’on adopte. Si le médiateur est autoritaire, il va avoir du mal à se faire entendre. Il doit être pédagogue. Il faut savoir trouver sa place.

Qu’est-ce qui vous plaisait dans ce métier ?

M-L. A. J’ai toujours été attachée au service et à la télévision publique. Si on n’écoute pas ceux qui nous regardent, c’est dommageable. J’ai toujours essayé d’être à l’écoute. Ce qui m’intéresse, c’est de nourrir une réflexion sur le traitement de l’actualité et sur les questions des téléspectateurs. Elles rejoignent souvent celles que l’on se pose en conférence de rédaction. On a besoin d’entretenir le lien avec le public.

Thomas Cuny, Valentin Jamin et Noé Poitevin